Du 10.01 au 4.03.2022
Aux Fonds Patrimoniaux de Liège
Le train et le chemin de fer relèvent, à mon avis, de ce que Roland Barthes appelait les signifiants purs : « une forme en laquelle les hommes ne cessent de mettre du sens, qu'ils prélèvent à volonté dans leur savoir, dans leurs rêves, leur histoire, sans que ce sens soit jamais fini et fixé ». Le train serait sa propre métaphore : une motrice tirant des wagons vides. A chacun de les charger de ce qu'il veut : voyageurs ou marchandises, couleurs ou souvenirs. A vous d'en faire le train des vacances ou celui du train-train quotidien. A vous d'en choisir la destination.
Symbole de la modernité qu'il a d'ailleurs contribué à créer, il traverse l'espace de façon rationnelle et rectiligne. Symbole de la maîtrise du temps, il roule le jour, il roule la nuit. Grande fut sa contribution au développement du culte de l'horaire et de la régularité. Voyez dans les gares, temples du progrès, les horloges monumentales. A l'opposé des rapides qui relient les mégapoles se jouant des obstacles, franchissant les fleuves et les précipices, perçant les montagnes...il est d'autres trains qui batifolent, qui s'égarent dans la campagne ; tandis que d'autres encore vendent du rêve dans des parcs d'attraction ou des sites touristiques, trains du temps perdu et du plaisir. Entre les deux, filent les trains de légende et des liaisons fantastiques aux noms « magiques »... tels le Transsibérien ou l'Orient-Express.
Le train est spectacle. On guette son passage. Jadis, il était accompagné par le souffle rythmé de la vapeur que l'on prenait plaisir à « onomatopéiser » tandis que son panache de fumée était emporté par la vitesse et par le vent. En même temps que le train est regardé par les uns, il est regard sur l'espace traversé. Par la fenêtre, le voyageur contemple le paysage qui défile sous ses yeux, s'étonnant quelquefois des points de vue imprenables qui lui sont offerts. Dans l'album pour enfants, le train passe et repasse : trains d'hier et d'aujourd'hui, trains fugueurs, trains vagabonds, trains poussifs, trains de la dérision et du temps gaspillé, trains de rêve, trains des tragédies humaines et des pages sombres de notre histoire... Dépouillement graphique ou, au contraire, surcharge de l'image. Dépaysement garanti.
Jeux sur le format. Jeux sur le dépliement. Jeux sonores. Jeux poétiques : les Ateliers du Texte et de l'Image vous souhaitent un bon voyage.
Michel Defourny
*** L'exposition Trains en jeux fait écho à l'édition Trains & Tracks d'Europalia Arts Festival.
Elle est accessible sur réservation uniquement et en visite commentée, du lundi au vendredi.
Infos et réservations : brigitte.vdb@lesati.be
*** Le texte de présentation de l'exposition est extrait de la communication de Michel Defourny, «Trains en jeux », dans Jeux graphiques dans l'album pour la jeunesse, sous la direction de Jean Perrot (Actes du congrès de 1988 parus en 1991 dans la collection Argos, CDRP Académie de Créteil Université Paris-Nord).